TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE DRAGUIGNAN
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Chambre 1
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JUGEMENT DU 23 Avril 2024
Dossier N° RG 22/05040 – N° Portalis DB3D-W-B7G-JQIG
Minute n° : 2024/ 213
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
PRÉSIDENT : Madame [C1]
GREFFIER : Madame [C2]
DÉBATS :
A l’audience publique du 20 Février 2024 mis en délibéré au 09 Avril 2024 prorogé au 23 Avril 2024
JUGEMENT :
Rendu après débats publics par mise à disposition au greffe, par décision contradictoire et en premier ressort.
NOM DES PARTIES :
DEMANDERESSE :
[Madame Y]
[Adresse Y]
représentée par Maître Jean-Baptiste POLITANO, avocat au barreau de TOULON D’UNE PART ;
DEFENDERESSE :
S.A.S.U. [Entreprise X]
[Adresse X]
représentée par Maître Geoffrey BARTHELEMY, avocat au barreau de DRAGUIGNAN D’AUTRE PART ;
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EXPOSE DU LITIGE
En date du 28 avril 2021, [Madame Y] a acquis auprès de la S.A.S.U. [Entreprise X] un véhicule de marque CITROEN, modèle DS3 immatriculé [immatriculation X], après avoir vu une annonce sur le site LA CENTRALE.
La carte grise du véhicule, remise lors de sa livraison, le désignait comme un véhicule 2 places.
Des échanges de correspondances ont suivi entre [Madame Y] et la société [Entreprise X], [Madame Y] sollicitant la mise en conformité du véhicule pour être utilisé comme un véhicule 5 places (en étant en mesure de l’assurer comme tel).
Vu l’assignation adressée par [Madame Y] à la S.A.S.U. [Entreprise X] en date de 12 juillet 2022 ;
Vu les dernières conclusions adressées aux intérêts de [Madame Y] en date du 12 avril 2023 ;
Vu les dernières écritures signifiées par la S.A.S.U. [Entreprise X] en date du 11 octobre 2023 ;
Vu l’ordonnance de clôture de l’instruction de la procédure rendue par le Juge la mise en état en date du 14 décembre 2023, fixant la clôture au jour même et l’audience au 20 février 2024 ;
Vu les débats tenus à l’audience, par suite desquels la décision a été mise en délibéré au 9 avril 2024 prorogée au 23 avril suivant ;
MOTIFS DE LA DECISION
[Madame Y] sollicite de voir prononcée la résolution de la vente, à titre principal pour défaut de conformité du véhicule et, à titre subsidiaire sur le fondement des vices cachés.
Sur la non-conformité du véhicule
A l’appui de sa demande, [Madame Y] vise à titre principal les dispositions des article 1604 et suivants du Code civil.
En application de ces textes, le vendeur est tenu de livrer la chose vendue conforme à l’acheteur.
Aux termes de l’article 1614 du Code civil, «la chose doit être délivrée en l’état où elle se trouve au moment de la vente […] », l’article 1615 poursuivant que « l’obligation de délivrer la chose comprend ses accessoires et tout ce qui est destiné à son usage perpétuel».
Les bons de commande versés aux débats par les deux parties divergent en ce que le document produit par la S.A.S.U. [Entreprise X] comporte (ou non) la mention en gras « véhicule vendu en CTTE dériv VP 2 places. Banquette ar + ceinture présentes mais démontées du véhicule au moment de la vente ».
Or, non seulement cette mention comporte nombre d’abréviations qu’un consommateur n’est pas censé pouvoir aisément transcrire ; mais en plus, cette mention est de nature à prêter confusion sur la possibilité d’un remontage (à la charge de l’acquéreur) de la banquette arrière, en vue de l’utilisation du véhicule pour le transport de cinq personnes. Au vu des documents produits aux débats, il n’a pas été satisfait à l’obligation d’information particulière qui pesait sur le vendeur du véhicule -par le report de cette simple mention.
L’annonce mentionnant les caractéristiques du véhicule indiquait également la présence d’une « banquette arrière 3 places », libellé qui n’est pas contesté par la société venderesse. Or, ce libellé rendait d’autant moins évident pour l’acheteuse qu’elle allait acquérir un véhicule ne comportant que 2 places. Il aurait convenu pour le vendeur de spécifier cette caractéristique.
Enfin, courriel adressé le 21 avril 2021 par [Madame Y] à la société [Entreprise X] tend à confirmer que [Madame Y] entendait acheter un véhicule cinq places, indépendamment de la demande (de nombreuses fois réitérées par la suite) de « mise en conformité » ; notamment, à cet égard, elle mentionne transporter régulièrement des personnes en « blablacar ».
En outre, le courriel adressé par la venderesse à la précédente propriétaire du véhicule (société Citroën), confirme que le garage avait bien eu connaissance de l’intention de [Madame Y] d’acquérir un véhicule 5 places.
Il se déduit de l’annonce précédent la vente, des discussions précédentes et successives à la vente ainsi que de l’absence de document informatif au jour de la conclusion du contrat, que la chose livrée à [Madame Y] par la société [Entreprise X] est non conforme par rapport aux spécifications de la carte grise.
Au regard de la résistance de la société [Entreprise X] de mettre en conformité la carte grise du véhicule, la possibilité d’établissement par l’administration d’une autorisation de circulation du véhicule apparaît d’autant plus incertaine. Il s’ensuit qu’il doit être fait droit à la demande formulée par [Madame Y] tendant à la résolution de la vente intervenue entre les parties.
Il y aura lieu à restitution du prix de vente par la société [Entreprise X], celle-ci ne formulant aucune demande subsidiaire relative à la restitution du prix dans l’hypothèse d’une résolution de la vente.
Il n’y aura pas lieu d’assortir la somme des intérêts au taux légal à compter de l’acte introductif d’instance, dans la mesure où, bien que la restitution du prix de vente ait été ordonnée, [Madame Y] a eu l’usage du véhicule depuis sa délivrance, et ne démontre pas avoir arrêté d’en faire usage au jour de l’introduction de l’instance. Les intérêts s’appliqueront au taux légal à compter du prononcé de la décision en application des dispositions de l’article 1231-7 du Code civil sans qu’il y ait lieu à une mention spécifique aux dispositions de la présente décision.
De même, il n’y aura pas lieu à capitalisation des intérêts, aucun fondement textuel n’étant visé à l’appui de cette demande.
Le véhicule devra être restitué par [Madame Y] à la S.A.S.U. [Entreprise X] en l’état de son kilométrage au jour de ladite restitution ; la société [Entreprise X] aura à charge de récupérer le véhicule sur son lieu de stationnement.
Toutefois, en l’absence d’échec de toute tentative d’exécution (relativement à une restitution du véhicule), la demande de voir prononcer une astreinte assortissant la demande de restitution devra être rejetée.
En l’état de la résiliation, et considérant ce qui précède, il n’y aura pas lieu de faire droit à la demande de remboursement concernant le coût du certificat d’immatriculation, [Madame Y] ayant vraisemblablement circulé avec celui-ci depuis la conclusion de la vente.
En outre, [Madame Y] sollicite le paiement d’un préjudice de jouissance à hauteur de 5.200 €, soit 400 € par mois à compter du 1 mai 2021 jusqu’au 31 juin er 2022.
Or, pour solliciter cette somme, [Madame Y] n’apporte aucun justificatif établissant la réalité d’un préjudice tel que chiffré dans sa demande. En effet, elle a pu faire usage du véhicule qui était néanmoins roulant -en dépit du défaut de conformité l’affectant.
En conséquence, cette demande entre en voie de rejet.
Il sera observé qu’aucune demande de dommages et intérêts n’est formulé par [Madame Y] dans le cadre de sa demande fondée sur le défaut de conformité dans le dispositif des dernières écritures de la demanderesse.
Sur les demandes accessoires
La S.A.S.U. [Entreprise X], succombant en l’instance, sera condamnée aux dépens, frais qui seront recouvrables en application des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.
En outre, la S.A.S.U. [Entreprise X] sera condamnée payer à [Madame Y] la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement rendu en premier ressort et par mise à disposition au Greffe,
PRONONCE la résolution de la vente du véhicule CITROEN, modèle DS3, immatriculé [immatriculation X] conclue entre la S.A.S.U. [Entreprise X] et [Madame Y] en date du 28 avril 2021 ;
ORDONNE la restitution du prix de vente par la S.A.S.U. [Entreprise X], soit la somme de 8.344,76 euros ;
ORDONNE la restitution du véhicule par [Madame Y] à la S.A.S.U. [Entreprise X], à charge pour cette société de venir récupérer le véhicule au domicile de [Madame Y] dans le délai de 15 jours à compter de la signification de la décision ;
REJETTE la demande au titre du préjudice de jouissance ;
REJETTE la demande tendant au remboursement du coût du certificat d’immatriculation ;
CONDAMNE la S.A.S.U. [Entreprise X] à payer à [Madame Y] la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;
REJETTE toute autre demande ;
CONDAMNE la S.A.S.U. [Entreprise X] aux dépens, recouvrables en application des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.
AINSI JUGE ET PRONONCE AU GREFFE DE LA PREMIERE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE DRAGUIGNAN LE 23 AVRIL 2024.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,