Le PACS produit des effets entre les partenaires (I) et à l’égard des tiers (II).Certains d’entre eux sont d’ordre public. En effet, le Conseil constitutionnel a précisé que les dispositions des articles 515-1 à 515-7 C. civ. (sauf l’art. 515-5 C. civ. sur les présomptions d’indivision) ne peuvent être écartées ou aménagées par les parties. Le PACS est donc doté d’un «tronc commun» d’ordre public ce qui entraine une impossibilité pour les parties de modifier, supprimer ces dispositions communes à défaut toutes clauses contraires seront déclarées réputées non écrites.
Pour le reste, les parties peuvent exercer une liberté contractuelle ordinaire. En outre, les partenaires peuvent à tout moment décider d’un commun accord de modifier la convention de PACS. Aucun contrôle du respect de «l’intérêt de la famille» n’est ici opéré comme dans le cadre d’un changement de régime matrimonial. La procédure de modification du contrat est particulièrement simplifiée: «La convention par laquelle les partenaires modifient le pacte civil de solidarité est remise ou adressée à l’officier de l’état civil ou au notaire qui a reçu l’acte initial afin d’y être enregistrée.» (C.civ., art.515-3, al.6). La procédure et les formalités de publicité sont en revanche les mêmes que lors de la formation du pacte et donc de la convention initiale.
I. LES EFFETS ENTRE LES PARTENAIRES
On étudiera en premier lieu les effets personnels (A), avant d’envisager les effets patrimoniaux (B).
Les effets personnels
Suivant l’article 515-4 C. civ., dans « les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s’engagent à une vie commune, ainsi qu’à une aide matérielle et une assistance réciproques».
Il convient de préciser que, dans les cas où la loi n’attache pas au PACS les mêmes avantages qu’au mariage, il n’est pas possible d’étendre par analogie les règles ne concernant que les époux (ex: l’enfant qui viendra à naître est un enfant naturel; le PACS ne confère en lui-même aucun avantage relatif à l’acquisition de la nationalité française, mais constitue simplement un élément d’appréciation des liens personnels en France permettant d’obtenir une carte de séjour).
En revanche, les textes bénéficiant aux concubins s’appliquent aux parties à un PACS (droit à l’assistance médicale à la procréation, déchéance de la prestation compensatoire ou du droit au bail…).
[Devoir d’assistance]
Le législateur consacre une obligation d’assistance qui devrait être similaire à celle existant entre époux. Toutefois, on peut craindre que cette obligation soit de faible portée, car aucune sanction n’est édictée. Dès lors, on pense simplement à une action en responsabilité engagée sur le fondement du droit commun.
[Vie commune]
Depuis la loi de 2006, l’art. 515-4 C. civ. dispose que «les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s’engagent à une vie commune». En 1999, le Conseil constitutionnel avait précisé que «la notion de vie commune ne recouvre pas seulement une communauté d’intérêts et ne se limite pas à l’exigence d’une simple cohabitation entre deux personnes; la vie commune mentionnée par la loi déférée suppose, outre une résidence commune, une vie de couple». Pour autant, cette obligation de vie commune n’est assortie d’aucune sanction, tout comme le devoir d’assistance.
[Devoir de fidélité]
L’obligation de cohabitation sera-t-elle interprétée comme exigeant une vie de couple «ex-clusive»,
une obligation de fidélité ? Sous l’empire de la loi de 1999, un jugement du TGI de Lille du 5 juin 2002 a retenu que le devoir de communauté de vie doit être exécuté loyalement, ce qui impose de sanctionner l’infidélité, et que l’inexécution de l’obligation d’exécuter loyalement le PACS peut justifier la résiliation du PACS aux torts de l’auteur de l’infidélité. Le TGI Lille s’est ainsi prononcé en faveur de l’existence d’un devoir de fidélité, le tirant de l’ancien article 1134, alinéa 3, du C. civ. (art. 1104 nouveau), qui s’applique à tous les contrats et qui énonce l’obligation de loyauté(«Vu l’article 515-1 du C. civ. (…), l’article 1134 du code civil : Attendu qu’il découle de l’article 515-1 du C. civ. une obligation de vie commune entre partenaires d’un Pacte civil de solidarité, qui doit être exécutée loyalement. Que l’obligation de devoir exécuter loyalement le devoir de communauté de vie commande de sanctionner toute forme d’infidélité entre partenaires. Que le manquement à l’obligation de vie commune justifie une procédure en résiliation de PACS aux torts du partenaire fautif». Partant, le président du TGI de Lille a autorisé un partenaire pacsé à diligenter un huissier pour faire constater l’adultère commis par son partenaire. La décision a étonné à plusieurs titres, d’autant que la CA Paris (9 nov. 2006, précité à propos des vices du consentement) avait considéré que les «incartades» du partenaire ne pouvaient entacher le PACS de nullité.
Quoiqu’il en soit, il semble difficile de se voir allouer des dommages et intérêts du fait du non respect à son devoir de fidélité. Néanmoins, il est possible selon une appréciation souveraine des juges d’obtenir des dommages et intérêts si le comportement dépasse une certaine limite…
Les effets patrimoniaux
Entre partenaires, les effets patrimoniaux concernent l’aide mutuelle et matérielle et le régime des biens.
A – L’aide mutuelle et matérielle
Les partenaires doivent s’apporter une «aide mutuelle et matérielle» (art. 515-4 C. civ.).
La loi de 2006 a modifié le texte qui prévoit désormais que, sauf convention contraire, l’aide matérielle estpro-portionnelle à leurs facultés respectives. Cela confirme l’assimilation de cette aide à la contribution aux charges du ménage entre époux, de sorte que la jurisprudence en matière de mariage devrait pouvoir être transposée au pacs.Le Conseil constitutionnel avait d’ailleurs précisé, en 1999, que le principe de cette obligation est d’ordre public, les partenaires pouvant simplement en aménager les modalités (montant et contenu: argent, nature…). Cette interprétation rejoint l’interdiction faite aux époux de prévoir une suppression totale de l’obligation de con-tribution au bénéfice de l’un ou de l’autre.
S’agissant de l’exécution de l’obligation, alors que l’art. 214, al.2, prévoit que «si l’un des époux ne remplit pas son obligation [de contribuer auxcharges du mariage], il peut-y être contraint par l’autre dans les formes prévues au Code de procédure civile», il n’est rien prévu de tel pour l’aide mutuelle et matérielle. Mais on ne voit guère de raison pour que l’exécution forcée soit refusée.
En outre, l’article 515-7 C. civ. précise que «sauf convention contraire, les créances dont les partenaires sont titulaires l’un envers l’autre sont évaluées selon les règles prévues à l’article1469. Ces créances peuvent être compensées avec les avantages que leur titulaire a pu retirer de la vie commune, notamment en ne contribuant pas à hauteur de ses facultés aux dettes contractées pour les besoins de la vie courante». Cela signifie que l’aide mutuelle et matérielle peut être invoquée pour faire échec à une demande de paiement d’une créance entre partenaires de PACS: lorsqu’un partenaire réclame à l’autre le paiement d’une créance, celui qui en est débiteur pourra se défendre en démontrant que le demandeur n’a pas contribué à hauteur de ses facultés au paiement des charges de la vie courante (c’est-à-dire n’a pas exécuté son obligation d’aide mutuelle et matérielle). La créance invoquée se compensera alors avec la dette d’aide mutuelle et matérielle.
B – Le régime des biens
On distinguera le régime du logement (1) et celui des autres biens (2).
1) Le logement
Le logement des partenaires de PACS est mieux protégé lorsque les partenaires sont locataires de leur logement que lorsqu’ils en sont propriétaires.
En effet, depuis la loi du24 mars 2014, dite «loi ALUR», la cotitularité légale du droit au bail prévue par l’article 1751 du Code civil a été étendue aux partenaires pacsés (auparavant, elle profitait seulement aux époux).
Dorénavant, l’article 1751 du Code civil prévoit donc que le droit au bail qui porte sur le logement des partenaires est réputé appartenir aux deux partenaires, quand bien même le contrat de location n’aurait été conclu que par un seul d’entre eux. Toutefois, il faut noter que contrairement aux époux, cette cotitularité n’est pas de plein droit et implique une formalité, une démarche positive du locataire.
Ils doivent en faire la demande conjointe au bailleur, qui ne peut refuser si les conditions sont remplies. Cette cotitularité a les mêmes effets qu’à l’égard des époux : inefficacité de la résiliation décidée par un seul des partenaires et inopposabilité du congé donné à un seul des partenaires.
En outre, l’article 1751, al. 3, prévoit «qu’en cas de décès d’un des époux ou d’un des partenaires liés par un pacte civil de solidarité, le conjoint ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité survivant cotitulaire du bail dispose d’un droit exclusif sur celui-ci sauf s’il y renonce expressément». Ce droit suppose que la demande conjointe de cotitularité ait été faite avant le décès.
Enfin, la loi ALUR a également ajouté un article 1751-1 au C. civ., qui vise plus largement les autres «cas de dissolution du pacte civil de solidarité».
Ce texte prévoit qu’en «cas de dissolution du pacte civil de solidarité, l’un des partenaires peut saisir le juge compétent en matière de bail aux fins de se voir attribuer le droit au bail du local, sans caractère professionnel ou commercial, qui sert effectivement à l’habitation des deux partenaires, sous réserve des créances ou droits à indemnité au profit de l’autre partenaire. Le bailleur est appelé à l’instance. Le juge apprécie la demande en considération des intérêts sociaux et familiaux des parties».
Cette disposition est équivalente à celle qui existait à l’article 1751, al. 2 pour les époux.
En revanche, si le bien qui sert de logement est la propriété de l’un des partenaires, aucune protection particulière n’est prévue par la loi : en l’absence d’une règle inspirée de l’article 215, alinéa 3, du Code civil, le partenaire propriétaire est donc parfaitement en droit de vendre le bien abritant le logement du couple sans l’accord de l’autre.
2) Les autres biens
Le régime des biens est gouverné, depuis la loi du 23 juin 2006, par un principe de séparation (a) auquel les parties peuvent déroger en stipulant une convention d’indivision (b).
Auparavant, sous l’empire de la loi de 1999, le régime de principe reposait sur une présomption d’indivision des biens acquis à titre onéreux postérieurement à la conclusion du pacte, sauf convention contraire des parties stipulée dans la convention de PACS (pour les meubles meublants) ou dans l’acte d’acquisition (pour les autres biens): v. ancien art. 515-5 C. civ.
La loi de 2006, qui a inversé le principe et l’exception, prévoit que les nouvelles dispositions relatives au régime des biens (les articles 515-5 à 515-5-3 du C. civ.) ne s’appliqueront de plein droit qu’aux PACS conclus après l’entrée en vigueur de la loi nouvelle (soit à compter du 1erjanvier 2007). Cependant, les partenaires ayant conclu un pacte sous l’empire de la loi ancienne auront la faculté de soumettre celui-ci aux dispositions de la loi nouvelle par convention modificative.
a) Le régime légal: la séparation des biens
L’instauration d’un régime légal de type séparatif en matière de PACS résulte des règles de gestion prévues par l’article 515-5 du Code civil, qui sont la transposition au PACS des articles 1536 à 1538 C. civ. applicables au régime de la séparation de biens entre époux.
[Principe séparatif]
L’article 515-5, al. 1er, C. civ. énonce que, «sauf dispositions contraires de la convention, cha-cun des partenaires conserve l’administration, la jouissance et la libre disposition de ses biens personnels et que chacun d’eux reste seul tenu des dettes personnelles nées avant ou pendant le pacte, hors le cas du dernier alinéa de l’article 515-4» (i.e. les dettes ménagères).Ainsi, désormais, chacun des partenaires reste propriétaire, non seulement des biens acquis avant la conclusion du pacte, mais aussi des biens acquis postérieurement, que ce soit à titre gratuit ou onéreux.
[Preuve]
S’agissant des difficultés de preuve, l’art. 515-5, al. 2, prévoit que «chacun des partenaires peut prouver par tous les moyens, tant à l’égard de son partenaire que des tiers, qu’il a la propriété exclusive d’un bien. Les biens sur lesquels aucun des partenaires ne peut justifier d’une propriété exclusive sont réputés leur appartenir indivisément, à chacun pour moitié».
Ce texte pose donc une présomption d’indivision pour les biens sur lesquels aucun des partenaires ne parvient à prouver sa propriété exclusive (comp. art. 1538, al. 3, pour les couples mariés sous le régime de la séparation de biens).
Exception à l’exclusivité de gestion.
Si l’article 515-5 C. civ. réserve par principe à chaque partenaire le pouvoir exclusif de gérer ses biens, le troisième alinéa du texte prévoit une exception, qui ne joue qu’à l’égard des tiers, et non pas entre les partenaires: suivant ce texte, «le partenaire qui détient individuellement un bien meuble est réputé, à l’égard des tiers de bonne foi, avoir le pouvoir de faire seul sur ce bien tout acte d’administration, de jouissance ou de disposition». Ce texte reprend le principe de l’autonomie mobilière prévue dans le mariage par l’art. 222 C. civ., au sein du régime primaire prévu pour le mariage.
[Passif]
S’agissant du passif, l’article 515-4 al. 1er, C. civ. prévoit que chacun des partenaires reste seul tenu des dettes personnelles nées avant ou pendant le pacte, hors le cas des dettes ménagères qui, on le verra, sont sou-mises à un principe de solidarité (v. infra, les effets du PACS à l’égard des tiers). L’article 515-7 in fine C. civ., quant à lui, prévoit, dans le cadre de la dissolution du PACS, qu’à défaut de convention contraire, les créances dont les partenaires sont titulaires l’un envers l’autre sont évaluées selon les règles de l’article 1469 du C. civ.
b) Le régime conventionnel: l’indivision des acquêts
L’art. 515-5 C. civ. autorise les partenaires à adopter conventionnellement un autre régime que celui qu’il met en place.
[Indivision conventionnelle d’acquêts]
Cette possibilité est développée par l’article 515-5-1 C. civ., qui prévoit que «les partenaires peuvent, dans la convention initiale ou dans une convention modificative, choisir de soumettre au régime de l’indivision les biens qu’ils acquièrent, ensemble ou séparément, à compter de l’enregistrement de ces conventions. Ces biens sont alors réputés indivis par moitié, sans recours de l’un des partenaires contre l’autre au titre d’une contribution inégale». L’application de ce texte conduit à mettre en place une «indivision d’acquêts», c’est-à-dire à soumettre au régime de l’indivision tous les biens acquis par l’un ou l’autre des partenaires au cours du PACS(à compter de l’enregistrement de la convention d’indivision). Chacun des partenaires sera propriétaire indivis de ces biens à hauteur de 50%. Le texte ne précise pas si les biens acquis à titre gratuit pendant le PACS tombent ou non dans l’indivision; l’analogie avec le régime de la communauté réduite aux acquêts en mariage invite à considérer que seuls les biens acquis à titre onéreux tombent dans l’indivision, à l’exclusion des biens acquis à titre gratuit.
Bien que l’article 515-5-1 du Code civil reste silencieux sur ce point, une partie de la doctrine estime que les partenaires ont la possibilité de déroger à ces principes, en vertu de la liberté contractuelle, car le texte n’est pas listé parmi les dispositions d’ordre public. Il est ainsi suggéré que les partenaires pourraient étendre ou restreindre le domaine de l’indivision conventionnelle par rapport au champ prévu par la loi, ou encore prévoir une répartition inégale des droits indivis entre les partenaires.
[Limite à l’indivision conventionnelle: les biens propres par nature]
L’article 515-5-2 du Code civil limite le domaine de l’indivision conventionnelle en établissant une liste de biens qui demeurent la propriété exclusive de chaque partenaire. Il s’agit donc de biens propres par nature, qui ne tombent pas dans l’indivision (cette catégorie étant toutefois plus restreinte qu’entre époux).
Sont visés :
L’art.515-5-2 dispose en effet que, toutefois, demeurent la propriété exclusive de chaque partenaire :
1° «Les deniers perçus par chacun des partenaires, à quelque titre que ce soit, postérieurement à la conclusion du pacte et non employés à l’acquisition d’un bien». Autrement dit, les gains et salaires des partenaires restent leur propriété personnelle (contrairement à ce qui se passe en matière de mariage, dans le régime de la communauté réduite aux acquêts); seules les acquisitions réalisées tombent dans l’indivision.
2° «Les biens créés et leurs accessoires» (là encore, la solution diffère de celle retenue dans le régime de la communauté réduite aux acquêts).
3° «Les biens à caractère personnel». Cette catégorie devrait inclure, comme entre époux, les droits personnels (ex: créance de réparation d’un dommage corporel ou moral) et les instruments de travail.
4° «Les biens ou portions de biens acquis au moyen de deniers appartenant à un partenaire antérieurement à l’enregistrement de la convention initiale ou modificative aux termes de laquelle ce régime a été choisi». Cela vise les acquisitions réalisées au moyen de sommes perçues par un partenaire avant la mise en place de la convention d’indivision (laquelle ne coïncide pas nécessairement avec la conclusion du PACS). Cela vise le mécanisme de l’emploi (utilisation de sommes personnelles pour acquérir un nouveau bien, qui sera lui aussi personnel). Il repose sur la technique de la subrogation réelle, mais une subrogation qui n’est pas automatique, car l’emploi de ces derniers personnels devra être mentionné dans l’acte d’acquisition (v. art. 515-5-2 in fine C. civ.). À défaut, le bien sera réputé indivis par moitié et donnera lieu à une créance entre partenaires, au profit de celui dont les deniers ont été utilisés.
5° «Les biens ou portions de biens acquis au moyen de deniers reçus par donation ou succession». Les acquisitions ainsi réalisées restent personnelles à chaque partenaire, peu important l’époque à laquelle a eu lieu la donation ou la succession. Toutefois, la même formalité de déclaration dans l’acte d’acquisition est requise que pour les derniers visés dans le 4°.
6° «Les portions de biens acquises à titre de licitation de tout ou partie d’un bien dont l’un des partenaires était propriétaire au sein d’une indivision successorale ou par suite d’une donation». Ce texte transpose l’article 1408 du C. civ. Il vise le rachat de parts indivises d’un bien dont l’un des partenaires (seulement) est propriétaire indivis avec des tiers, par suite d’une succession ou d’une donation. Cette règle vise à éviter qu’une nouvelle indivision vienne se superposer à une indivision préexistante.
Gestion des biens indivis.L’art. 515-5-3 C. civ. prévoit que, sauf clause contraire, chaque partenaire est gérant de l’indivision et peut exercer les pouvoirs reconnus par les articles 1873-6 à 1873-8 C. civ. Ces textes renvoient eux-mêmes au régime de la communauté réduite aux acquêts (régime légal des couples mariés), en prévoyant que «le gérant administre l’indivision et exerce, à cet effet, les pouvoirs attribués à chaque époux sur les biens communs. Il ne peut, toutefois, disposer des meubles corporels que pour les besoins d’une exploitation normale des biens indivis, ou encore s’il s’agit de choses difficiles à conserver ou sujettes à dépérissement.» En conséquence, chacun des partenaires a le pouvoir d’exercer seul (principe de gestion concurrente) les actes de conservation et d’administration des biens indivis, essentiellement. En revanche, la plupart des actes de disposition sur les biens indivis sont soumis à un principe de gestion conjointe (ou cogestion) nécessitant l’accord des deux partenaires.
II. LES EFFETS À L’ÉGARD DES TIERS
Le PACS peut être opposé par les partenaires aux tiers et opposé par les tiers aux partenaires.
Le PACS opposé aux tiers
[Assimilation légale avec les époux]
Les partenaires sont assimilés à des époux pour le jeu de certaines dispositions du Code du travail (congé simultané, autorisation d’absence pour décès…), du Code pénal (violences conju-gales), du Code de la fonction publique (priorité de mutation), du Code de la sécurité sociale (qualité d’ayant-droit…), du Code de commerce(la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie a étendu au partenaire le statut du conjoint collaborateur, associé ou salarié travaillant dans l’entreprise de son partenaire [art. 121-8 C. com.], ce qui était déjà admis en droit rural par l’article L. 321-3 C. rural), ou encore du Code général des impôts (la loi dite TEPA du 21 août 2007 a exonéré les partenaires, comme les époux, des droits de mutation à cause de mort pour les successions ouvertes à compter du 22 août 2007 [art. 796-0 bis CGI], et a aligné les droits de mutation entre vifs des partenaires de PACS sur ceux des couples mariés).
Le PACS invoqué par les tiers
Les tiers ont intérêt à invoquer l’existence du PACS lorsqu’ils souhaitent poursuivre les deux partenaires pour obtenir le paiement d’une dette contractée par un seul d’entre eux. Cette possibilité résulte de la solidarité légale instituée entre les partenaires par l’article 515-4 du Code civil, à l’image de celle instaurée entre les époux par l’article 220 du même Code. Ce texte prévoit un principe qu’il assortit d’exceptions.
[Principe: solidarité des dettes ménagères]
L’article 515-4, al. 2, C. civ. dispose que «les partenaires sont tenus solidairement à l’égard des tiers des dettes contractées par l’un d’eux pour les besoins de la vie courante». La loi de 1999 prévoyait en outre la solidarité des dépenses relatives au logement commun, ce qui a disparu en 2006. Les dettes en cause devraient être les mêmes qu’en matière de mariage (même si l’entretien des enfants n’est pas mentionné).
[Première exception: les dépenses excessives]
Le texte poursuit en précisant que, «toutefois, cette solidarité n’a pas lieu pour les dépenses manifestement excessives.». Cette première exception a été ajoutée par la loi du 23 mai 2006, par extension des règles prévues entre époux.
[Seconde exception: les emprunts et achats à tempérament]
La solidarité n’a pas lieu non plus « n’a pas lieu non plus, s’ils n’ont été conclus du consentement des deux partenaires, pour les achats à tempérament ou pour les emprunts à moins que ces derniers ne portent sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante [ajout de la loi du 1erjuillet 2010] et que le montant cumulé de ces sommes, en cas de pluralité d’emprunts, ne soit pas manifestement excessif eu égard au train de vie du ménage[ajout de la loi du 17 mars 2014]». Ces différents ajouts conduisent à régir la solidarité entre partenaires par des règles quasi similaires à celles gouvernant la solidarité entre époux (v. infra, sur la solidarité des dettes ménagères entre époux, pour davantage de développements sur le sens de ces dispositions).
SUR LA DISSOLUTION DU PACS
Les causes de dissolution du PACS
[Dissolution de plein droit]
L’article 515-7, al. 1er, du Code civil énonce que le pacte civil de solidarité se dissout par la mort de l’un des partenaires ou par le mariage des partenaires ou de l’un d’eux. Il s’agit de causes de dissolution de plein droit, qui prennent effet à la date de l’événement.
[Dissolution volontaire]
L’article 515-7, al. 3, du Code civil, énonce que le pacte civil de solidarité se dissout également par déclaration conjointe des partenaires ou décision unilatérale de l’un d’eux. Dans le premier cas, une déclaration conjointe de dissolution devra être adressée à l’officier de l’état civil du lieu d’enregistrement du pacte (au greffe du tribunal pour les dissolutions antérieures au 1ernovembre 2017) ou au notaire instrumentaire qui a procédé à l’enregistrement du pacte. Dans le second cas, le partenaire qui décide de mettre fin au pacte doit faire signifier sa décision à l’autre et adresser une copie de cette signification à l’officier de l’état civil (au greffe du tribunal, avant le 1er novembre 2017) ou au notaire instrumentaire.
Pour la rupture d’un PACS lorsque l’un des partenaires est placé sous tutelle, v. les règles spécifiques posées par l’article 462 C. civ.:la personne placée sous tutelle peut prendre l’initiative d’une rupture –et même sans son tuteur si le partenaire y consent. À défaut, les formalités de signification devront être réalisées par le tuteur. Inversement, dans l’hypothèse d’une rupture unilatérale émanant du compagnon du partenaire sous tutelle, la signification devra en être faite à la personne du tuteur. Enfin, la rupture peut intervenir à l’initiative du tuteur, à la condition qu’il y soit autorisé par le juge des tutelles ou par le conseil de famille lorsque celui-ci a été constitué. Dans tous les cas, le partenaire sous tutelle doit être représenté par son tuteur pour les opérations de liquidation de ses droits. Quant au majeur en curatelle, il devra être assisté pour signifier la rupture unilatérale à son partenaire (mais pas pour la rupture conjointe).
Qu’elle soit faite par déclaration conjointe ou décision unilatérale, la dissolution prend effet:
– dans les rapports entre les partenaires, à la date de son enregistrement ;
– à l’égard des tiers, à compter du jour où les formalités de publicité auront été accomplies (transcription de la dissolution en marge de l’acte de naissance des partenaires).
Les effets de la dissolution
La dissolution du PACS peut produire plusieurs effets d’ordre patrimonial: d’abord, elle peut nécessiter de liquider les intérêts patrimoniaux des partenaires, notamment en présence de biens indivis (A); ensuite, elle peut éventuellement donner lieu à l’octroi de dommages-intérêts sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle (B). Enfin, en cas de dissolution par décès, le législateur a prévu un minimum de droit ab intestat en conférant au partenaire survivant des droits sur le logement du partenaire décédé, malgré son absence de vocation successo-rale légale (C).
Ce à quoi il faut ajouter la possibilité, reconnue par la loi du 23 mars 2019et introduite à l’article 373-2-9-1 du Code civil, d’attribuer la jouissance du logement de la familleà l’un des parents, lorsque le juge aux affaires fami-liales est saisi d’une requête relative aux modalités d’exercice de l’autorité parentale (sur cette disposition, v. infra, sur l’aménagement de l’exercice de l’autorité parentale et l’incidence de la séparation des parents). De fait, cette disposition pourra bénéficier aux couples pacsés, à raison de leur éventuel statut de parents.
A – La liquidation des intérêts pécuniaires
L’art. 515-7, al. 10, C. civ. laisse aux partenaires le soin de procéder eux-mêmes à la liquidation de leurs droits et obligations, suivant le droit commun du partage des biens indivis. À défaut d’accord, ils pourront avoir recours au juge.
L’art. 515-7, al. 11, C. civ. ajoute, depuis la loi du 23 juin 2006, que « sauf convention contraire, les créances dont les partenaires sont titulaires l’un envers l’autre sont évaluées selon les règles prévues à l’article 1469. Ces créances peuvent être compensées avec les avantages que leur titulaire a pu retirer de la vie commune, notamment en ne contribuant pas à hauteur de ses facultés aux dettes contractées pour les besoins de la vie courante ». Ce sont donc les règles relatives aux récompenses entre époux qui s’appliquent pour liquider les créances entre partenaires, ce qui permet de réévaluer les créances à la date de la dissolution du pacte, pour tenir compte de l’inflation monétaire.
B – Le droit à réparation (Sur le fondement combiné des articles 515-7 et 1240 nv du code civil)
Principe. Tout en laissant les partenaires libres de liquider eux-mêmes leurs droits, l’art. 515-7, al. 10, C. civ. ré-serve «la réparation du dommage éventuellement subi», qui peut être ordonnée par le juge. Ce faisant, le texte consacre l’interprétation qu’avait dégagée le Conseil constitutionnel, admettant que le partenaire délaissé puisse, en vertu de l’ancien article 1382 du Code civil (nouvel art. 1240), demander réparation du dommage dont il a été victime en raison d’une faute tenant aux conditions de la rupture. Tout comme en matière de rupture des fian-çailles ou de concubinage, la rupture du PACS ne saurait être fautive en soi (V. par ex. TGI Lille, 7 sept. 2009; CA Montpellier, 4 janv. 2011), seules les circonstances de la rupture peuvent être fautives (ex: rupture brutale ou injurieuse). Sera alors réparé sur ce fondement le préjudice causé par les circonstances rendant la rupture abusive.
Incertitudes. À défaut de précision du texte sur le droit à réparation, la doctrine s’interroge sur le point de savoir si un partenaire pourrait solliciter, en outre, la réparation du dommage subi du fait de la rupture elle-même (ex: la disparité des niveaux de vie créée par la rupture), mais cette solution ne semble pas pouvoir être retenue, du fait qu’elle reviendrait à renverser le principe de la liberté de la rupture et éventuellement à maintenir l’aide mutuelle et matérielle après la dissolution du PACS. En revanche, une majorité de la doctrine s’accorde à considérer que la responsabilité contractuelle du partenaire fautif pourrait être engagée pour obtenir la réparation des préjudices causés par l’inexécution des obligations issues du PACS.
Les tempéraments à l’absence de vocation successorale
On l’a vu, le PACS ne crée aucune vocation successorale entre les partenaires. Pour autant, la loi a ménagé certains droits au partenaire survivant, en cas de dissolution du PACS par prédécès de l’un des partenaires.
Tout d’abord, l’art. 763 C. civ. qui prévoit un droit annuel de jouissance gratuite au profit du conjoint survivant, est applicable au partenaire de PACS qui survit au décès de l’autre. Ainsi, le partenaire survivant qui, à l’époque du décès, occupait effectivement, à titre d’habitation principale, un logement appartenant aux deux partenaires ou dépendant totalement de la succession du partenaire prédécédé pourra en jouir gratuitement pendant un an. Mais le partenaire peut être privé de ce droit par testament, car l’art. 515-6 C. civ. ne renvoie qu’aux deux premiers alinéas de l’art. 763, non au troisième qui énonce son caractère d’ordre public.
Ensuite, sous réserve que le partenaire défunt l’ait expressément prévu par testament, les dispositions de l’article 831-3, al. 1ersont applicables au partenaire survivant: celui-ci pourra obtenir l’attribution préférentielle de la propriété du local qui lui servait d’habitation, s’il y avait sa résidence à l’époque du décès, et du mobilier le gar-nissant (attribution de droit).
Enfin, l’attribution préférentielle d’une entreprise ou d’une exploitation agricole indivise peut jouer en vertu de l’article 515-6, al. 1erC. civ. : les dispositions des art. 831, 831-2, 832-3 et 832-4 C. civ. sont applicables aux partenaires. Mais le nombre de biens indivis ayant diminué avec la loi de 2006, la disposition a perdu un certain nombre de ses hypothèses d’application.